Qu'il ne soit point parlé de votre miséricorde, ô Vierge bienheureuse, s'il se trouve un seul homme qui se rappelle vous avoir invoquée en vain dans ses besoins. Pour ce qui est de toutes vos autres vertus, ô vous dont nous sommes les humbles serviteurs, nous vous en félicitons pour vous-même, mais pour ce qui est de celle-ci, c'est nous que nous en félicitons. Nous avons des louanges à donner à votre virginité, et nous tâchons d'imiter votre humilité; mais ce qui charme tout particulièrement des malheureux comme nous, c'est la miséricorde; ce que nous embrassons plus étroitement, ce que nous invoquons le plus souvent, est la miséricorde. C'est elle, en effet, qui a obtenu la réparation de l'univers entier, et le salut de tous les hommes, car on ne peut douter qu'elle n'ait songé avec sollicitude à tout le genre humain à la fois, la femme à qui il fut dit : "Ne craignez ô Marie, vous avez trouvé la grâce (Luc. I, 39)", que vous cherchiez sans doute. Qui donc, ô femme bénie, pourra mesurer la longueur, et la largeur, la sublimité et la profondeur, de votre miséricorde? Sa longueur : elle secourt jusqu'à son dernier jour celui qui l'invoque. Sa largeur : elle remplit si bien la terre entière, qu'on peut dire de vous aussi que la terre est pleine de votre miséricorde. Quant à sa sublimité et à sa profondeur, elle s'élève, d'un côté, à la restauration de la cité céleste, et de l'autre, elle apporte la rédemption à tous ceux qui sont assis dans les ténèbres, à l'ombre de la mort. En effet, c'est pour vous, ô Vierge, que le ciel s'est rempli, et que l'enfer s'est vidé, que les brèches de la céleste Jérusalem se sont relevées, et que la vie a été rendue aux malheureux hommes qui l'avaient perdue et qui l'attendaient. Voilà comment votre toute puissante et toute bonne charité abonde, en sentiments de compassion, et en désirs de venir à notre secours, aussi riche en compassion qu'en assistance.
Aussi, que notre âme, dévorée des ardeurs de la soif, vole à cette fontaine, que notre misère recoure avec sollicitude à ce comble de miséricorde. Tels sont les vœux dont nous vous accompagnons autant que nous le pouvons, à votre retour vers votre fils, et dont nous grossissons de loin votre cortège, ô Vierge bénie. Que désormais votre bonté ait à cœur de faire connaître au monde la grâce que vous avez trouvée devant Dieu, en obtenant, par vos prières, le pardon pour les pécheurs, la guérison pour les malades, la force pour les cœurs faibles, la consolation pour les affligés, du secours pour ceux qui sont en péril, et la délivrance pour les saints. Que, dans ce jour de fête et de joie, ô Marie, reine de clémence, vos petits serviteurs qui invoqueront votre très-doux nom obtiennent les dons de la grâce de Jésus-Christ votre fils, Notre-Seigneur qui est le Dieu béni par dessus tout, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Fin du 4e sermon de saint Bernard pour la fête de l’Assomption.