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La Pologne divisée ?

Titre d'une dépêche de l'AFP :

« La Pologne soudain divisée après le choix du Wawel pour enterrer Kaczynski »

Non, ce n'est pas la Pologne qui est divisée, mais son intelligentsia. Le journal de l'aile gauche (gauche polonaise...) de Solidarité, Gazeta Wyborcza, prend position contre l'inhumation de Lech Kaczynski au Wawel. Il le fait en termes mesurés (cf. les propos d'Adam Michnik qui défrisent Jean Quatremer) : c'est une décision "hâtive et émotionnelle", "une inhumation au Wawel devrait être le résultat d'une discussion nationale", "ce serait alors démocratique et digne". Et le journal publie une lettre d'Andrzej Wajda, qui appelle les autorités ecclésiastiques à "retirer cette décision hautement déplacée, prise à la hâte, au moment du deuil". "Le président Lech Kaczynski fut un homme modeste et bon, mais il n'y a aucune raison pour qu'il repose au Wawel, parmi les rois de Pologne et le maréchal Jozef Pilsudski", écrit-il.

Sur le plan politique, Wajda a raison. Lech Kaczynski n'est ni un roi ni un héros de l'indépendance polonaise. Mais il y a chez le cinéaste une myopie spirituelle, que j'avais déjà remarquée (mais pas dans ses films...). La mort de Kaczynski près de Katyn est un événement historique, notamment quant aux relations entre la Pologne et la Russie. Cette dimension a quelque chose de prophétique et dépasse de très loin le côté émotionnel dû au deuil. Ce sont des symboles qui sont inhumés au Wawel. Et Lech Kaczynski est devenu, malgré lui, un symbole.

On signalera aussi que l'autorisation d'inhumer une personnalité au Wawel revient à l'archevêque de Cracovie. Qui est le cardinal Dziwisz, l'ancien secrétaire de Jean-Paul II. Et il n'est pas extravagant de penser que le cardinal Dziwisz ait vu un signe dans le fait que le drame ait eu lieu le jour liturgique du 5e anniversaire de la mort de Jean-Paul II, la veille du 10e anniversaire de la fête de la Divine Miséricorde, ce qui illumine le côté prophétique de l'événement.

Commentaires

  • Et bien, malgré tout le respect que je vous dois et en saluant votre polonophilie que j'ai souvent remarquée, je peux affirmer que la décision d'inhumer L. Kaczynski à la cathédrale de Wawel est très mal vécue par une très grande partie du peuple polonais. J'ai passé toute la soirée d'hier et toute la journée ici à Varsovie,à en discuter avec des gens simples, des hommes et des femmes de la rue. Le sentiment qui domine est : "pourquoi" cette décision ? Ce qui n'empêche pas qu'il fallait aujourd'hui attendre 9 heures en moyenne pour pouvoir s'incliner devant les cercueils du couple présidentiel. Le président est mort au service de la patrie. Avec les commandants de l'armée et les évêques de l'armée pour honorer la mémoire des morts de Katyn.

    Le respect du aux morts fait partie de la culture polonaise; le peuple ne se divisera pas. Mais cette décision est difficile à accepter et vous devriez le comprendre . Il faut toutefois espérer que PERSONNE ne profite de ce drame pour manipuler des symboles avec des intentions électorales.
    Lech Kaczynski est l'enfant de Varsovie, son maire, le créateur du musée du soulèvement, le fils d'un combattant de l'AK .... Dommage qu'il ne soit pas parmis nous.

  • Smolensk est un mini-Katyn.

  • Il n'y a pas au Wawel que le maréchal Pilsudski ; s'y trouve aussi depuis 1993 le général Ladislas Sikorski (dont les hauts faits ne sont pas très évidents), mort comme L. Kaczynski d'un "accident" d'avion. Personnellement, j'y verrais bien aussi Richard Kaczorowski, dernier président de la IIe République polonaise mort ce samedi dans cet accident terrestre providentiel faisant 100 % de victimes. D'ailleurs, le Wawel devrait en règle générale abriter chaque dirigeant polonais assassiné par les Russes.

  • Exact. J'ai oublié Sikorski.
    Mais je ne crois pas une seconde à la thèse de l'attentat (pour Kaczynski, et pour Sikorski c'est loin d'être évident).

  • Il ne s'agit pas d'y croire, il s'agit de se poser la question.

    Pour Sikorski, les archives anglaises doivent rester secrètes jusqu'en 2050. Le dossier reste secret.

    Tout de même ces morts violentes n'ont pas fait de peine à tout le monde, cela invite à se poser des questions.

  • Quand samedi matin j'ai vu l'alerte du New York Times dans ma boîte aux lettres (il y avait d'autres journaux, mais bon, c'est celle-là que j'ai vue en premier), titrant sur le président polonais (la suite non visible), je me suis dit « Tiens ?!... » ; puis la suite du message : je n'en croyais pas mes yeux, je croyais à une plaisanterie ; et ma première pensée a été vers Sikorski... C'est dire si on s'attend à tout de la part d'un colonel du KGB, le dénommé Putin. Tout comme, si vous l'avez vu, Stéphane Courtois (ex ayant viré sa cuti ; un homme expérimenté, donc), lundi après-midi chez Thierry Guerrier, qui a grosso modo la même position que moi : c'est à Putin de prouver son innocence dans cette affaire.

    Quand un avion français s'écrase, c'est toujours le même refrain : « L'enquête promet d'être longue, qui permettra de savoir s'il s'agit d'une erreur humaine ou d'une défaillance technique. »... Avec la Pologne, c'est un peu comme la tour nº 7 du World Trade Center, dont on attendait impatiemment la chute : dix minutes avant l'accident, tout le monde répétait « C'est une erreur de pilotage ! une erreur de pilotage ! ».

    Moi, les Soviétiques, je les connais.

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