Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Saint Jérôme

Je me suis livré à une étude particulière d'Isaïe, que j'appellerai le prince des prophètes, non à cause de sa haute naissance, mais à cause de la beauté de son génie, de l'éclat et de la force de son éloquence. Ses idées sont grandes et magnifiques, ses pensées sont fortes et élevées, ses images sont nobles et majestueuses, et son style est brillant et énergique.

Aussi a-t-il été difficile de conserver dans la traduction toutes les beautés et toute la noblesse de ses expressions. D'un autre côté, il est bon de prévenir qu'il est tout aussi bien un évangéliste qu'un prophète ; car il nous révèle d'une manière si claire et si frappante tous les mystères de Jésus-Christ et de l'Eglise, qu'il semble plutôt raconter des choses passées que prédire des choses à venir. Et je pense que c'est ce qui a engagé les Septante, comme il sera facile de le remarquer en lisant cette traduction, à omettre plusieurs passages et à cacher aux païens les mystères de la religion judaïque, de peur de donner les « choses saintes aux chiens » et de jeter les perles devant les pourceaux.

Je sais au reste combien les prophètes sont difficiles à expliquer et je n'ignore pas que je m'expose à la censure de ceux qui, par une secrète envie, méprisent tout ce qui parait leur être supérieur. Je m'attends donc à me voir livré à toutes les attaques de l'envie et de la médisance. Mais comme les Grecs, qui néanmoins se servent de la version des Septante, ne laissent pas que de consulter les traductions d'Aquila, de Symmaque et de Théodotion, soit pour profiter de leurs lumières, soit pour mieux entendre les Septante en comparant toutes ces versions avec la leur, je prie ces lecteurs difficiles qui ne trouvent rien à leur goût de me permettre d'ajouter encore une traduction à celles que l'on a déjà données au public, et je les conjure de prendre la peine de la lire avant que de la mépriser, de peur qu'on ne les accuse de ta condamner plutôt par prévention et par caprice que par raison et avec connaissance de cause.

Mais je reviens à Isaïe. Ce prophète a paru dans Jérusalem et dans la Judée avant la captivité des dix tribus. Il prédit tantôt en général, tantôt séparément, tout ce qui doit arriver aux deux royaumes de Juda et d'Israël. On dirait qu'il est entré dans le secret des desseins de la sagesse divine, et que Dieu n'a rien eu de caché pour lui; car, bien qu'il semble n'avoir en vue que les affaires de son temps et le rétablissement des Juifs après la captivité de Babylone, il est cependant certain que sa grande affaire est de nous indiquer la vocation des gentils et l'avènement de Jésus-Christ. Comme ce divin Sauveur est l'unique objet de votre affection, je vous supplie aussi, mesdames, de le prier, avec une ardeur égale à votre amour, de me tenir compte un jour des chagrins et des ennuis que me font maintenant éprouver mes ennemis, qui ne se fatiguent ni de m'attaquer, ni de me diffamer de toutes les manières; car notre Seigneur sait bien que je ne me suis appliqué avec tant de soin et de travail à l'étude d'une langue étrangère que pour empêcher les Juifs d'insulter plus longtemps à son Eglise, et de lui reprocher que tout est corrompu et défiguré dans nos saintes Ecritures.

(Lettre à Paula et Eustochia)

Les commentaires sont fermés.