Quel mystère nouveau et admirable! Jean ne naît pas encore et déjà il parle par ses tressaillements; il ne paraît pas encore et déjà il profère des avertissements; il ne peut pas encore crier et déjà il se fait entendre par des actes; il n'a pas encore commencé sa vie et déjà il prêche Dieu; il ne voit pas encore la lumière et déjà il montre le Soleil; il n'est pas encore mis au monde et déjà il se hâte d'agir en précurseur. Le Seigneur est là: il ne peut se retenir, il ne supporte pas d'attendre les limites fixées par la nature, mais il s'efforce de rompre la prison du sein maternel et il cherche à faire connaître d'avance la venue du Sauveur. Il se dit donc: «Il est arrivé, celui qui brise les liens. Et quoi? Moi, je reste assis enchaîné, et je suis encore tenu à demeurer ici? Le Verbe vient pour tout rétablir et moi, je reste encore captif? Je sortirai, je courrai devant lui et je proclamerai à tous: Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde.»
Mais, dis-nous, Jean, retenu encore dans l'obscurité du sein de ta mère, comment vois-tu et entends-tu? Comment contemples-tu les choses divines? Comment peux-tu tressaillir et exulter? «Grand, dit-il, est le mystère qui s'accomplit, c'est un acte qui échappe à la compréhension de l'homme. A bon droit j'innove dans l'ordre naturel à cause de celui qui doit innover dans l'ordre surnaturel. «Je vois, avant même que de naître, car je vois en gestation le Soleil de justice. A l'ouIe je perçois, car je viens au monde, voix du grand Verbe. Je crie, car je contemple, revêtu de sa chair, le Fils unique du Père. J'exulte, car je vois le Créateur de l'univers recevoir la forme humaine. Je bondis, car je pense que le Rédempteur du monde a pris corps. Je prélude à son avènement et, en quelque sorte, je vous devance par mon témoignage.»
(saint Jean Chrysostome)