Comme s’il n’avait pas assez de problèmes comme cela avec l’Irak, le gouvernement américain se trouve désormais confronté à une fronde de ses diplomates, qui ne veulent plus aller à Bagdad...
Mercredi dernier, une réunion de plusieurs centaines de fonctionnaires des Affaires étrangères au département d’Etat a été très houleuse. Ils protestent contre une directive qui les menace d’affectation d’office s’il n’y a pas 48 volontaires pour l’ambassade de Bagdad. L’un d’eux a qualifié de « peine de mort potentielle » l’envoi forcé de diplomates en Irak.
L’ambassade des Etats-Unis à Bagdad est la plus importante du monde. Il ne s’agit pas seulement de diplomatie, mais d’œuvrer à la « reconstruction » du pays qu’on a démoli. Les diplomates n’apprécient pas non plus d’avoir comme tâche de superviser la reconstruction. Car les « équipes provinciales de reconstruction » (PRT) étant également en manque d’experts, ce sont les fonctionnaires des Affaires étrangères qui sont censés jouer ce rôle, pour lequel ils ne sont pas formés (il y a belle lurette que les fonctionnaires des ministères de l’Agriculture ou du Commerce ne veulent pas non plus aller en Irak...).
D’autre part, un rapport publié hier par le Pentagone montre que l’explosion du nombre de sous-traitants travaillant pour l’armée américaine a créé les conditions d’une augmentation des gaspillages et des fraudes, tant en Afghanistan qu’au Koweit et en Irak. Le nombre de personnes affectées à la surveillance des contrats a baissé d’un quart au cours des années 90, alors que la sous-traitance a augmenté de 600%. En outre, seulement 36% de ces personnes sont qualifiées pour ce travail en Irak. La commission qui a rédigé ce rapport recommande de renforcer le personnel par 500 fonctionnaires supplémentaires...
A la suite de la réunion houleuse au département d’Etat, Condoleezza Rice a indiqué qu’elle allait envoyer un câble aux diplomates américains partout dans le monde pour parler de la directive et les encourager à servir en Irak. Le directeur des ressources humaines du ministère a précisé que désormais chaque diplomate devrait assurer un poste difficile lors d’une affectation sur trois...
Lors d’une escale à Shannon, ce matin, Condoleezza Rice a tenté de minimiser le problème, mais a fermement rappelé les diplomates à leur devoir : « Vu que tant de monde a déjà servi volontairement en Irak, je souhaiterais que les autres pensent à leurs obligations non seulement envers leur pays, mais aussi envers ceux qui ont déjà servi », et elle a ajouté : « L’Irak est la priorité numéro 1 des Etats-Unis et nous remplirons nos obligations. »