Le Sénat a adopté hier en première lecture le projet de loi dont on nous dit qu’il porte sur le service minimum dans les transports, et dont on rappelle qu’il s’agissait d’une promesse électorale de Nicolas Sarkozy.
La gauche et les syndicats crient très fort contre ce projet, qui porte atteinte au droit de grève, etc.
Mais, comme pour la réforme de l’université et la lutte contre la récidive, dont les textes ont déjà été adoptés par les sénateurs, et le « paquet fiscal », déjà adopté par les députés, ce projet de loi est très en retrait des promesses de Nicolas Sarkozy.
D’abord, l’expression « service minimum » ne figure pas dans ce projet de loi « sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres de voyageurs ».
A priori, on peut supposer que la mention de la « continuité du service public », s’il ne s’agit pas seulement du rappel d’un principe du droit, implique dans un tel texte la définition d’un service minimum. Mais si l’on cherche dans le texte ce qui s’y rapporte, on trouve seulement ceci : la collectivité territoriale définit les « dessertes à assurer en priorité en cas de perturbation prévisible du trafic », pour cause de grève, d’incident technique ou d’aléa climatique, et prévoit un « plan d’information des usagers ».
Et une fois qu’on a « défini » et qu’on a « informé », qu’est-ce qu’on fait ?
Il est significatif que cet aspect du texte, qui devait être central, n’est pas critiqué par la gauche et les syndicats. Les hurlements visent deux autres articles, et ce sont ceux-là qui « portent atteinte au droit de grève ».
Il s‘agit de l’obligation pour un gréviste de se déclarer tel 48 heures à l ‘avance, et de l’instauration d’un vote à bulletins secrets pour décider de la poursuite ou de l’arrêt du mouvement au-delà de huit jours de grève (mais ce vote est facultatif et son résultat n’est pas contraignant !...).
On comprend que ces mesures gênent les gréviculteurs et les amateurs de piquets de grève (qui ont toujours été illégaux), mais on ne voit pas en quoi elles porteraient atteinte au droit de grève, puisque, au contraire, elles le présupposent, et renforcent la légitimité de la grève déclenchée de façon légale.
Naturellement, les syndicats ne sont pas contents non plus du renforcement du principe de non-paiement des heures de grève. Il devrait aller de soi que lorsqu’on fait grève on n’est pas payé, mais le paiement des jours de grève était devenu, du moins dans certains secteurs (notamment des transports), quasiment un droit acquis. La nouvelle loi stipule que toute disposition contractuelle contraire au principe du non-paiement est désormais « réputée sans cause ». Ce qui n’empêche pas un paiement « non contractuel »...
Bref, c’est un projet de loi qui tente de moraliser un peu la grève (il comporte aussi que toute entreprise de transport doit se doter d’un accord cadre de prévention des conflits, il interdit le dépôt d’un deuxième préavis de grève pour les mêmes motifs avant l’échéance du premier en cours...), mais qui ne modifiera pas substantiellement la situation. Comme les autres lois que fait voter Sarkozy.