Au cours d’un « chat » vidéo sur internet depuis Matignon, François Fillon a souhaité la mise en place d’un « vrai régime présidentiel » qui implique la... suppression du poste de Premier ministre.
Telle est « la logique des institutions » qu’il « souhaite » : un président de la République « qui dirige le gouvernement lui-même », avec en face de lui « une Assemblée beaucoup plus puissante, qui ne peut pas être dissoute par le président de la République ». Mais François Fillon estime que « la France n’est pas aujourd’hui prête à accepter un système comme celui-là ». Alors, dans un premier temps, « il faut sans doute faire un pas vers un régime plus présidentiel, avec un Premier ministre qui reste le coordinateur du gouvernement ».
Chacun constate que ce « premier pas » est déjà largement accompli. Comme on a pu le vérifier une nouvelle fois avec le « discours de politique générale du Premier ministre », servile répétition des discours de Nicolas Sarkozy : une prestation parfaitement inutile, de la part d’un « coordinateur du gouvernement ».
Mais les troupes ont manifestement du mal à suivre. Quelques heures plus tôt, Bernard Accoyer, le président de l’Assemblée nationale, ex-président du groupe UMP, affirmait que si le quinquennat avait modifié la donne, « il faut souligner que tout cela ne peut fonctionner qu’avec un Premier ministre qui est le maître du gouvernement ». Et d’ajouter qu’on « ne peut certainement pas » se passer d’un Premier ministre...
Sans doute Bernard Accoyer se souvient-il confusément qu’il y a une Constitution de la République qui règle ces rapports entre les institutions. François Fillon, quant à lui, se moque éperdument de la Constitution. Comme son patron Sarkozy, qui viole allègrement tous les jours les articles 20 (le gouvernement détermine et conduit la politique de la nation) et 21 (le Premier ministre dirige l’action du gouvernement).
Dans une République normale, Nicolas Sarkozy serait mis en demeure par le Conseil constitutionnel de respecter la Constitution. A sa décharge, on remarquera que, pour l’essentiel, ce n’est en fait ni le président de la République ni le gouvernement qui détermine la politique de la nation, mais Bruxelles. Sarkozy s’agite beaucoup, non pour diriger, mais pour faire croire et se faire croire à lui-même qu’il est le chef. Tout cela serait dérisoire, si ce n’était la survie de la France qui était en jeu.
Commentaires
Permettez-moi de citer de Gaulle (via le "c'était de Gaulle" de Peyrefitte) : "le premier ministre n'est que le premier des ministres" et de rappeler que la configuration actuelle est similaire à celle qui existait du temps de de Gaulle et Debré et où de Gaulle était le véritable chef du gouvernement.
Il faut d'ailleurs remarquer que la constitution ne dit pas qui est le "chef du gouvernement", ce en quoi elle permet une certaine souplesse, grâce à laquelle elle "tient la route" depuis un demi siècle...