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Tempus meum nondum advenit

« Or, Jésus leur dit : Mon temps n’est point encore venu; mais votre temps est toujours prêt ». Eh quoi ! le temps du Christ n’était-il pas encore arrivé ? Pourquoi donc le Christ était-il venu, si son temps ne l’était pas encore ? N’avons-nous pas entendu dire à l’Apôtre : « Mais lorsque les temps ont été accomplis, Dieu a envoyé son Fils ? » Si donc le Christ a été envoyé dans la plénitude des temps, il l’a été quand il a dû l’être ; il est venu, quand il a fallu qu’il vînt. Quel est donc le sens de ces paroles : « Mon temps n’est pas encore arrivé ? » Comprenez bien, mes frères, dans quelle intention lui parlaient ces hommes, peu semblaient lui donner des conseils comme à un frère. Ils l’engageaient à acquérir de la gloire ; dominés par je ne sais quel sentiment mondain et terrestre, ils le priaient de ne point rester dans l’obscurité et l’oubli. A des gens qui le conjuraient de penser à la gloire, dire « Mon temps n’est pas encore venu »,  c’était dire : Le temps de ma gloire n’est pas encore arrivé. Voyez combien est profond le sens de ces paroles : on lui parlait d’acquérir de la gloire, pour lui, il a voulu que sa grandeur fût précédée par les humiliations, il a voulu que le chemin pour arriver à l’élévation fût celui de l’humilité. Ceux de ses disciples qui désiraient s’asseoir, l’un à sa droite, l’autre à sa gauche, recherchaient aussi la gloire : ils considéraient le but, mais ils ne considéraient pas la voie à suivre. Afin qu’ils pussent arriver à la céleste patrie selon les règles de la justice, le Sauveur les ramena au chemin qui y conduit. La patrie est élevée ; humble est la voie. La patrie, c’est la vie du Christ : la voie, c’est sa mort. Le séjour du Christ, voilà la patrie ; sa passion, voilà le chemin qui y mène. Pourquoi prétendre entrer dans la patrie, si l’on refuse d’en suivre le chemin ? Enfin, telle fut sa réponse à ceux qui recherchaient la grandeur : « Pouvez-vous boire le calice que je boirai moi-même ? » Voilà par quel chemin on arrive l’élévation que vous désirez. Le calice dont il leur parlait était celui des humiliations et des souffrances.

(saint Augustin, commentaires sur saint Jean)

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