Encore Maria Zakharova, aujourd’hui :
Beaucoup de nouvelles de Paris aujourd'hui. Livraisons d'armes françaises au régime de Kyiv, accusations de la Russie de "déstabiliser la situation dans le Caucase"... Alors qu’on préparait les commentaires officiels les uns après les autres, on se rappelait les classiques français. En 1883, Guy de Maupassant publie un recueil de nouvelles "Toine" dans "Gil Blas" sous le pseudonyme de Maufrigneuse :
Et là Maria Zakharova cite un extrait de la nouvelle L’homme-fille, publiée en effet dans le journal Gil Blas en 1883, puis dans le recueil Toine. Mais il faut savoir que dans la traduction russe « homme-fille » devient carrément « homme prostitué », et c’est en effet dans ce sens que Maupassant emploie ici le mot « fille ». Voici le texte originel :
Notre Chambre des députés est peuplée d’hommes-filles. Ils y forment le grand parti des opportunistes aimables qu’on pourrait appeler « les charmeurs ». Ce sont ceux qui gouvernent avec des paroles douces et des promesses trompeuses, qui savent serrer les mains de façon à s’attacher les cœurs, dire « mon cher ami » d’une certaine manière délicate aux gens qu’ils connaissent le moins, changer d’opinion sans même s’en douter, s’exalter pour toute idée nouvelle, être sincères dans leurs croyances de girouettes, se laisser tromper comme ils trompent eux-mêmes, ne plus se souvenir le lendemain de ce qu’ils affirmaient la veille.
Les journaux sont pleins d’hommes-filles. C’est peut-être là qu’on en trouve le plus, mais c’est là aussi qu’ils sont le plus nécessaires. Il faut excepter quelques organes comme les Débats ou la Gazette de France.
Certes, tout bon journaliste doit être un peu fille, c’est-à-dire aux ordres du public, souple à suivre inconsciemment les nuances de l’opinion courante, ondoyant et divers, sceptique et crédule, méchant et dévoué, blagueur et prudhomme, enthousiaste et ironique, et toujours convaincu sans croire à rien.
Les étrangers, nos anti-types comme disait Mme Abel, les Anglais tenaces et les lourds Allemands, nous considèrent et nous considéreront jusqu’à la fin des siècles, avec un certain étonnement mêlé de mépris. Ils nous traitent de légers. Ce n’est pas cela, nous sommes des filles. Et voilà pourquoi on nous aime malgré nos défauts, pourquoi on revient à nous malgré le mal qu’on dit de nous ; ce sont des querelles d’amour !...
Commentaire de Maria Zakharova :
Guy de Maupassant n’est pas soumis à la cancel-culture? Pas interdit ? Ses livres sont toujours sur les étagères des bibliothèques, et ses romans continuent d'être transformés en films et pièces de théâtre ? Donc c’est un bon écrivain selon les normes occidentales…