Après avoir souligné l’entière liberté dont les évêques doivent jouir vis-à-vis du pouvoir civil, le concile forme le vœu « qu’à l’avenir ne soient plus accordés aux autorités civiles aucun droit ni aucun privilège d’élection, de nomination, de présentation ou de désignation en vue de la charge épiscopale ». Les autorités civiles « sont très courtoisement priées de bien vouloir renoncer d’elles-mêmes, en accord avec le Siège apostolique, à ces droits et privilèges dont elles jouissent actuellement en vertu d’une convention ou d’une coutume ». C’est en effet une bonne disposition, pour une authentique liberté de l’Eglise, mais qui exige de modifier tous les concordats. En France, c’est toujours le pouvoir politique qui nomme, formellement, du moins, les évêques de Strasbourg et de Metz, et il garde la possibilité de rejeter pour des « raisons politiques » la nomination d’un évêque dans les autres diocèses…
Sont ensuite abordées des questions qui n’appellent pas de commentaires : la délimitation des diocèses, les évêques coadjuteurs et auxiliaires, les vicaires épiscopaux et généraux, l’organisation de la curie diocésaine et des divers conseils (avec la participation de laïcs), les prêtres diocésains, les curés… Ici on lit que pour organiser la catéchèse, les curés doivent demander la coopération des religieux, mais aussi des laïcs, « en érigeant la confrérie de la doctrine chrétienne ». Je vois sur internet qu’il y eut des confréries de la doctrine chrétienne dans divers endroits après le concile… de Trente, mais je n’en vois pas une seule qui aurait été créée après le concile Vatican II… C’est aussi qu’il n’était plus vraiment question d’enseigner la doctrine chrétienne, comme le demandait pourtant le concile, mais de laisser l’enfant découvrir par lui-même d’éventuels éléments de la foi, ou plutôt d’une sentimentalité vaguement religieuse et parfaitement adogmatique.
Le chapitre III parle de « la coopération des évêques au bien commun de plusieurs Eglises ». Il s’agit de nouveau d’applications de la collégialité :
« Ce saint Concile œcuménique souhaite vivement que la véritable institution des synodes et des conciles connaisse une nouvelle vigueur afin de pourvoir, selon les circonstances, de façon plus adaptée et plus efficace, au progrès de la foi et au maintien de la discipline dans les diverses Églises. »
En fait on ne verra pas de tels conciles, ni de tels synodes, qui avaient pourtant eu une telle importance dans l’histoire de l’Eglise au premier millénaire. C’est que toute l’énergie collégiale sera utilisée pour constituer les « conférences épiscopales », dont le concile encourage ensuite la création dans tous les pays.
La dérive « collégialiste » des conférences épiscopales sera telle qu’en 1998 Jean-Paul II devra rappeler, dans son motu proprio Apostolos suos, qu’il n’y a d’action collégiale que lors d’un concile ou lorsque le pape appelle les évêques à un acte collégial ou au moins approuve ou accepte leur action commune. De ce fait il n’y a pas d’action collégiale au niveau d’une Eglise particulière : « l'Évêque diocésain paît au nom du Seigneur le troupeau qui lui est confié comme son pasteur propre, ordinaire et immédiat, et son action est strictement personnelle, non collégiale, même si elle est animée de l'esprit de communion. » Les conférences épiscopales sont une application non de la collégialité au sens théologique du terme, mais de l’esprit collégial (affectus collegialis). Et c’est un « fait essentiel » que « les conférences épiscopales, avec leurs commissions et leurs services, existent pour aider les évêques et non pour se substituer à eux ».
On lit encore : « Les Évêques ne peuvent pas, de manière autonome, ni personnellement ni réunis en Conférence, limiter leur pouvoir sacré au bénéfice de la conférence épiscopale, et moins encore d'une de ses parties, que ce soit le conseil permanent, ou une commission ou le président lui-même. »
Il est précisé également qu’une déclaration de la conférence épiscopale n’a d’autorité que si elle est signée par tous les évêques (puisqu’elle est alors celle de chaque évêque). Et en outre : « Aucun organe de la Conférence épiscopale, en dehors de l'assemblée plénière, n'a le pouvoir de poser des actes de magistère authentique. Et la Conférence épiscopale ne peut pas concéder un tel pouvoir aux commissions ou à d'autres organes constitués à l'intérieur d'elle-même. »
Mais on sait que Apostolos suos a été, comme tous les documents qui rappelaient les vraies dispositions conciliaires, reçu comme un « retour en arrière », et n’a pas été appliqué. D’autant que c’est tellement plus facile pour les journalistes que de pouvoir parler d’une prise de position de l’épiscopat quand il s’agit de l’opinion d’une commission…