Le Figaro publie un article sur l'éventuelle suppression des billets de 500 €. Parce que ces grosses coupures sont utilisées essentiellement par le « crime organisé ». Et l'on insiste sur les milieux maffieux. L'article se termine par le témoignage d'un commerçant qui ne les accepte plus : «La seule clientèle qui les exhibe sans complexe à la caisse, ce sont des gars souvent accompagnés de jolies filles qui parlent avec un fort accent russe. Nous, on ne veut pas de problèmes.»
Mais la seule fois où j'ai vu un panonceau indiquant « Nous n'acceptons pas les billets de 500 € », c'est dans une boutique de vêtements du centre commercial de Flins. Là où vont les « jeunes » des Mureaux...
Commentaires
les "trafiquants de drogue", le "crime organisé", etc. : Ils ont tous bon dos pour justifier une forme de restriction de plus, et cela masque mal, en fait, la volonté de l'Etat de contrôle maximal du citoyen, jusqu'à ses biens et son porte-monnaie.
Lisez ces quelques extraits de Bernanos :
"Il y a vingt ans, le petit bourgeois français refusait de laisser prendre ses empreintes digitales, formalité jusqu’alors réservée aux forçats. Oh ! oui, je sais, vous vous dites que ce sont là des bagatelles) Mais l’homme de mon pays, l’homme de l’ancienne France attachait à ses bagatelles une importance énorme. Chaque citoyen, chaque corporation, chaque état, chaque confrérie et presque chaque village, avait ses privilèges et les maintenait coûte que coûte. Durant des siècles pas un homme de police n’eût franchi le seuil inviolable de l’Université de Paris, sans être massacré par les étudiants. L’abbaye de Saint-Germain-des- Prés, comme beaucoup d’autres, jouissait du droit d’asile. Les immenses terrains qu’elle possédait au bord de la Seine, étaient ainsi devenus un repaire de malandrins. L’Abbé leur proposa de les embarquer à ses frais pour l’Amérique, avec un petit pécule. Dix-huit refusèrent pour lesquels on exigea du Roi une lettre de pardon. L’homme de l’ancienne France, cher lecteur, vous paraîtrait aisément aujourd’hui un anarchiste. Ce que vous appelez désordre, il l’appelait ordre. Je suis un homme de l’ancienne France, les Démocraties d’uniformisation me font rire. L’opinion publique, au XVIIIe siècle, s’est soulevée contre l’usage traditionnel d’enrôler de force, dans les ports, en cas de nécessité, un certain nombre de jeunes marins. Elle accusait aussi les sergents recruteurs de payer trop généreusement à boire aux garçons dont ils sollicitaient la signature qui allait les faire, pour six ans, soldats du Roi…
Aujourd’hui l’exception est devenue la règle, la Démocratie mobilise tout, hommes, femmes, enfants, animaux et machines, sans même vous demandez de trinquer à sa santé."
et encore :
"Car pour qu’un homme puisse se dire libre, il importe absolument qu’il ait fait de la Liberté son point d’honneur. Un homme d’honneur peut se passer de radio, de cinéma, d’auto, de frigidaire, mais il ne peut pas se passer d’honneur. Il refuse de céder la plus petite parcelle de son honneur, c’est-à-dire de ses libertés légitimes. Un homme d’honneur peut très bien mourir par point d’honneur – pour une raison en apparence futile. Elle n’est futile que pour les imbéciles. Un imbécile en effet est seul capable de se demander sérieusement si le simple geste à peine esquissé d’un soufflet, doit être considéré moins insultant qu’un coup de pied au derrière. Lorsqu’on comprend cela, on est beaucoup moins tenté de rire du brave bourgeois français refusant de laisser prendre ses empreintes digitales. Il avait parfaitement le droit de se demander si on s’en tiendrait là, si on ne finirait pas par lui imprimer au fer rouge un numéro sur la cuisse, afin de faciliter le travail des fonctionnaires. Et d’ailleurs les raisons par lesquelles on justifie la première mesure, serviraient aussi pour la seconde. Elles serviraient pour beaucoup d’autres, elles serviraient presque à l’infini. L’erreur commune est de se dire, à chaque nouvelle restriction : « Après tout, ce n’est qu’une liberté qu’on me demande. Lorsqu’on se permettra d’exiger ma liberté toute entière, je protesterai avec indignation ! »
Ces quelques lignes devraient nous remettre du baume au coeur, et devraient nous inciter à refuser, ce que l'on nous impose, au nom des "trafiquants de drogue", des "chauffards", etc., et qui ne sont ni plus ni moins que des privations de notre liberté.
Superbe Bernanos, mais il n'a pas pu écrire "ma liberté toute entière"... !
Mouai...
Moi je m'en fiche de l'honneur à tout prix. Au lieu de mourir comme un con, je préfère m'écraser face à une menace et ensuite confier le jugement à la justice. Parce que face à un fou, ou à un groupe, je préfère la vie à 10sec de gloire.
Celà dit, si on s'en prend à ma famille ou entourage, c'est direct les gros moyens.
Pour en revenir au sujet, je pense à ces personnes qui ne font pas confiance aux banques et qui tiennent à garder leur argent chez eux. Pas pratique d'avoir sa fortune en billet de 5€...
Au delà de la liberté, je pense que c'est pour une raison économique genre ça coûte cher à produire, il y a beaucoup de faux et c'est pas rentable, car en général les grosses sommes sont versées par chèque ou virement, non?
"...car en général les grosses sommes sont versées par chèque ou virement, non ?"
Oui, mais on peut très bien vouloir continuer à les règler en espèces, voire en billets de 500 €.
Comme le dit Bernanos, que j'ai cité, c'est d'apparence futile de chicaner sur le billet de 500 €, mais cela cache des choses bien plus profondes.
Au fond, on nous dit : - "Seuls les trafiquants de drogue ont des billets de 500 €, donc, si vous en avez, vous en êtes un" ou encore - "Si vous refusez de montrer vos papiers à un agent de police qui vous les demande, vous êtes un type louche, car l'honnête homme qui n'a rien à se reprocher n'a rien à craindre du contrôle de ses papiers".
Eh bien non : Je suis un honnête homme, et pourtant, je n'ai pas envie de présenter mes papiers, c'est tout.
Ce que nous dit Bernanos, c'est que ce type de raisonnement est valable à l'infini. Ainsi, on pourra obliger tout citoyen à porter un bracelet électronique, relié à un GPS, pour que l'on sache à chaque instant où il est. Vous refusez ? Eh bien, vous êtes un truand, parce que l'honnête homme n'a rien à craindre du fait que l'on sache, à chaque instant, où il est. Et on pourra continuer ainsi, jusqu'aux "marques au fer rouge" dont parle Bernanos.
Autre façon de voir les choses, souvenez-vous de la deuxième tentation du Christ :
"Au faîte du Temple de Jérusalem, le diable déclare à Jésus : - Jette-toi dans le vide, les anges te soutiendront. Jésus répond : - Tu ne mettras pas à l'épreuve le Seigneur ton Dieu"
On voit bien la correspondance avec notre situation : "Montre-moi tes papiers, si tu es un honnête homme, tu n'as rien à craindre. Par analogie : "les anges sont là pour te soutenir"". Et la réponse est : pas de mise à l'épreuve. C'est un commandement, et ça ne se discute pas.
Ce n'est pas parce que je n'ai rien à craindre que je dois montrer mes papiers, comme ce n'est pas parce que Dieu, les anges sont là que je peux sauter dans le vide.
Tous ces commentaires pour simplement dire, comme Bernanos, que nous devrions attacher beaucoup plus d'importance à ces petites futilités, qui s'entassent les unes après les autres, et finissent par nous enchaîner face à un Etat dont on aimerait être sûr (Je suis persuadé, pour ma part, du contraire) qu'il nous veut que du bien. Au moins, sans ces chaînes, nous conservons une certaine liberté de mouvement.