Nicolas Sarkozy a annoncé devant les partenaires sociaux qu’il confiait au directeur général de l'Insee, Jean-Philippe Cotis, une mission d'étude "sur le partage de la valeur ajoutée et son évolution, tant pour le secteur privé que pour les entreprises publiques".
Commentaires
Ce n'est pas une mission inutile; il est clair que le Président veut régler le problème de la redistribution des richesses.
Il concrétise une demande des papes de Pie XI à Jean-Paul II. C'est une réponse adéquat au problème majeur du capitalisme, mais il faudra aller plus loin. Il faut qu'un représentant des employés siège au conseil d'administration avec une voix décisionnaire. Ce qui renforcera la dignité du travail et des collaborateurs. Et enfin, cela peut constituer une garantie quant à la moralisation des investissements...
Je n'approuve pas tout de la politique de ce gouvernement, d'autant que je n'éprouve aucune sympathie intellectuelle pour la République, mais on doit expliquer et défendre une décision quand elle est juste et conforme à la Doctrine Sociale de l'Eglise.
Le rédacteur du Journal de l'alliance.org
Distribuer une partie des dividendes aux salariés, c'est une atteinte au droit de propriété. Certes, le droit de propriété n'est pas absolu, mais il n'y a ici aucune justification pour y porter atteinte. Il est bien évident que si les actionnaires sont dépossédés d'une partie de leurs revenus légitimes (ce que la doctrine sociale de l'Eglise ne prône certainement pas, car c'est une injustice), ils placeront leurs capitaux ailleurs, ce qui sera extrêmement dommageable pour l'économie, donc pour l'emploi, donc pour les salariés. C'est ni plus ni moins que du socialisme, et l'on connaît les résultats.
La véritable voie est celle de la participation des salariés au capital, en faisant des "prolétaires" des "capitalistes". Malheureusement le gaullisme (que Sarkozy oublie ici encore, d'ailleurs) a perverti la notion de participation (en privilégiant la participation aux bénéfices), et n'a pas osé mettre en oeuvre la véritable et effective participation des salariés au capital telle que l'avait conçue Louis Salleron, c'est-à-dire à une "diffusion du capital" pour en arriver à la "propriété collective" des moyens de production qui, à l'inverse de la solution communiste, ou de Sarkozy, ne lèse personne et respecte la propriété privée, qui est nécessaire.
De plus le compendium de la doctrine sociale prévoit que la participation se fasse dans la perspective du bien commun.
Le bien commun c'est vérité, justice et droits de l'homme, ce qui exclut des postes de responsables tous les relativistes pour qui il n'y a pas de vérité, pour qui la justice n'est qu'un mot déclanchant un réflexe pavlovien et qu'il n'y a pas de droits de l'homme. La morale darwiniste prétendant établir que le meilleur est le plus malhonnête, le plus "malin", soit le plus "adapté" disqualifie tout ses partisans. Elle est reine pourtant, au moins en théorie car avec elle il n'y aurait plus de société si elle régnait, dans toute les sociétés et jusqu'au Vatican.
C'est aussi injuste envers les salariés. Si votre entreprise est en bonne santé dans un secteur porteur vous avez des primes, participation, actions gratuites... plus ensuite une partie des nénéfices. Les salariés de Total par exemple sont déjà très privilégiés. Si votre entreprise est bancale ou dans un secteur en difficulté : rien alors que vous n'avez déjà pas d'augmentation et d'avantages. Donc c'est plus d'argent pour les salariés déjà bien lotis et rien pour les autres. Pour répartir la richesse, il y a mieux.
Non, l'Eglise met en valeur la notion de plus value, en soulignant que la valeur ajoutée au fruit du travail est due au travailleur en partie. La redistribution des richesses dans ce cas présent est une réponse équitable et équilibrée, je ne crois pas beaucoup au retrait des actionnaires à long terme. Il ne s'agit pas d'un vol, mais bien de régler un problème moral majeur en sachant que dans ce domaine, c'est par le compromis qu'on y parvient. Cette décision courageuse doit être complétée par un siège décisionnaire accordé à un représentant des employés.
Votre proposition faisant d'un employé un actionnaire et propriétaire du capital aboutira de toute façon au versement des dividendes en supplément du salaire.
La théorie de Louis Salleron s'est élaborée dans un contexte économique où n'émergeait pas encore le concept de mondialisation de l'économie, du moins pas en l'état d'aujourd'hui. Alors que depuis Pie XI l'Eglise sur ce point avançait des propositions prophétiques, car tous les facteurs de la crise actuelle étaient annoncés dans les enseignements du Magistère. Et c'est dans cette perspective que les papes ont envisagé la redistribution des richesses à partir des bénéfices nets.
Quant à ce que vous dites du rôle du gaullisme à ce sujet, j'en suis bien d'accord; si il avait le courage de Sarkozy bien des problèmes sociaux auraient leur solution dans le mouvement même d'une juste redistribution des richeses.
La "plus-value" est un concept spécifiquement marxiste, et Sarkozy l'emploie dans le sens marxiste : il s'agit du "profit" (comme dit Marx) que font les "capitalistes" grâce au "surtravail" des salariés (la part de travail non rétribuée, selon Marx, et qu'il faut donc rétribuer, selon Sarkozy).
En économie non marxiste on parle de valeur ajoutée. La valeur ajoutée permet de donner des salaires et de rétribuer les actionnaires (le capital). Il ne peut pas y avoir de troisième "part", puisqu'il n'y a pas d'autres protagonistes.
La solution est donc que les salariés participent eux aussi au capital, ce qui leur donne une responsabilité, en leur faisant partager les dividendes... et les risques.
(On notera que dans son intervention télévisée Sarkozy parle de "plus-value", alors que dans la "mission" le conseiller qui a écrit le texte parle de "valeur ajoutée". Mais "valeur ajoutée" a bien ici le sens de "plus-value", selon l'interprétation évidente, garantie par le président de la République...)
Plus value ou valeur ajoutée, aujourd'hui le sens est sans ambiguïté. Les salariés ne peuvent prendre part au capital que s'ils en ont les moyens. Il n'y a qu'une façon d'y parvenir: qu'ils réinvestissent librement une part de leurs dividendes dans le capital, ils ne peuvent pas le faire avec leur seul salaire et il n'appartient pas à l'Etat de les aider de ce point de vue. La seule source de revenu susceptible de leur permettre d'investir dans le capital et de procéder à une distribution équilibrée des bénéfices. On tourne en rond !