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  • 21e dimanche après la Pentecôte

    La parabole que conte Jésus dans l’évangile de ce dimanche est une illustration de ce qu’il vient de répondre à Pierre qui lui demandait si l’on devait pardonner jusqu’à sept fois. Jésus lui a répondu qu’on ne doit pas pardonner jusqu’à sept fois, mais jusqu’à 70 fois 7 fois. Le nombre 7 multiplié par 10 puis par lui-même ne donne pas un nombre mais une indéfinité : on doit toujours pardonner, sans aucun calcul d’aucune sorte. Comme Dieu pardonne.

    Alors Jésus raconte la parabole de cet « homme roi » qui découvre qu’un serviteur lui doit 10.000 talents. Aujourd’hui cela ne nous dit rien. Mais pour Pierre et les autres apôtres, la somme est inimaginable. Du reste aucun serviteur ne peut devoir 10.000 talents : l’équivalent d’au moins 60 millions de deniers, quelque chose comme 25 à 30 tonnes d’argent, cinquante fois plus que les impôts perçus par Hérode. Ces 10.000 talents sont l’équivalent du « 70 fois 7 fois ». Du reste, le mot grec pour dire 10.000 est le mot qui a donné « myriade ». Et déjà en grec, s’il voulait bien dire 10.000, il signifiait souvent « innombrable ». Comme on le voit aussi dans la première épître aux Corinthiens : « Dans l’église, j’aime mieux dire cinq paroles avec mon intelligence, afin d’instruire aussi les autres, que dix mille paroles en langue ». Et la « myriade » d’hommes dont il est question au premier verset du chapitre 12 de l’évangile de saint Luc en grec a été traduit dans la Vulgate par « multis ».

    Donc les apôtres ont aussitôt compris que Jésus parlait d’une dette incommensurable, d’autant qu’ils venaient d’entendre les « 70 fois 7 fois » du pardon : il ne parlait pas d’une dette d’argent, mais de celle du Pater : « dimitte nobis debita nostra, sicut et nos dimittimus debitoribus nostris ».

    Ce que confirme la suite de la parabole, puisque celui qui se reconnaît débiteur insolvable de « l’homme roi » refuse de remettre sa dette à son compagnon qui lui doit 100 deniers. Soit six cent mille fois moins. Et toutefois ce n’est pas rien : c’est plus de trois mois de salaire d’un ouvrier. Car il faut garder en tête qu’on parle du pardon des offenses. Jésus ne parle pas du pardon des offenses les plus minimes, mais de vraies offenses, qui font vraiment mal.

    En bref, si tu n’arrives pas à pardonner une offense qui, convertie en frappe au porte-monnaie, équivaut à trois mois de salaire, comment veux-tu que Dieu te pardonne tes péchés, qui sont incommensurables, parce que tout péché est une blessure infligée à la bonté et à la beauté infinies de Dieu.

    Et, in fine, Jésus insiste : il ne s’agit pas de pardonner en paroles, du bout des lèvres, ou en faisant des restrictions mentales, mais « de tout son cœur ». Comme « l’homme roi » avait remis sa dette au serviteur parce qu’il avait été ému par sa supplication. Le grec emploie le verbe formé sur le mot splagkhna, qui veut dire entrailles, et spécifiquement les entrailles de la mère, traduisant l’hébreu rahamim, qui est la plus profonde miséricorde. Quand nous demandons pardon à Dieu, il en est remué dans ses entrailles maternelles. Puisque nous devons être parfaits comme notre Père céleste est parfait, nous aussi devons faire miséricorde à celui qui nous a blessé. Comme une mère, sans compter.