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Rechercher : massorétique

  • Un nouveau Rico

    Le linguiste Christophe Rico vient de publier un nouveau texte passionnant et une nouvelle fois en décalage complet par rapport aux exégètes modernes, et en accord complet avec la tradition.

    Il s’agit de la fameuse phrase « la vierge concevra », d’Isaïe, le mot hébreu étant alma. Pour TOUS les exégètes modernes, et donc dans TOUTES les traductions modernes (sauf la traduction liturgique qui a tout récemment repris « la vierge » pour éviter la contradiction avec la citation qu’en fait saint Matthieu- et aussi Segond 21, me fait-on remarquer), alma est une « jeune femme » - ce qui rend sans aucun intérêt la prophétie d’Isaïe puisque des jeunes femmes enceintes il y en a tout le temps – et la rend absurde puisque cette banalité est annoncée avec une grande solennité.

    Christophe Rico prouve, par un travail inédit sur les textes hébraïques (et grecs et latins et syriaques), que « alma » veut bien dire « vierge », et précisément « adolescente vierge ». Et que saint Jérôme avait donc raison d’insister sur ce point et de défendre sa traduction, et que la tradition avait raison de dire comme lui. (Christophe Rico a même trouvé des textes de rabbins juifs du moyen âge – dont Rachi – qui admettent à leur corps défendant que « alma » implique la virginité, sachant qu’ils font ainsi un énorme cadeau aux chrétiens.)

    Au passage, Christophe Rico montre que le texte massorétique de Proverbes 30,19, qui est incompréhensible, est mal vocalisé, et que, une fois encore, c’est saint Jérôme qui a raison, ou plutôt qui avait une version bien vocalisée permettant de comprendre l’enchaînement des idées et l’unité de la triple et quadruple sentence.

    C’est un texte de 80 pages pas toujours facile à lire (et dont certains développements paraissent hors de proportion, notamment sur les titres des psaumes), mais pour quiconque s’intéresse à la question c’est désormais un texte fondamental.

  • L’invention de la ”mer des Roseaux”

    Les Hébreux avaient toujours traversé la mer Rouge, mais toutes les traductions françaises « catholiques » modernes ont « mer des Roseaux » (ou « mer des Joncs ») - ce qui n’est et n’a jamais été le nom d’une mer. (Un certain nombre de traductions protestantes gardent « mer Rouge ». La dernière traduction catholique à avoir « mer Rouge » est la Pirot-Clamer.)

    Il semble que ce soit une fantaisie française récente, et germanique depuis… Luther. Aucune des dix traductions anglaises que j’ai vues (y compris la New English Translation de 2005) ne parle de mer des Roseaux, toutes ont : mer Rouge.

    En général on ne vous dit même pas pourquoi on appelle la mer Rouge « mer des Roseaux ». Et quand par hasard on consent à ajouter une note, c’est simplement pour souligner qu’une fois de plus la Septante et la Vulgate se sont trompées. Comme s’est trompé saint Etienne (Actes 7,37), comme s’est trompée l’épître aux Hébreux (11,29), comme se sont trompés les commentateurs juifs (à commencer par Philon), comme se sont trompés tous les pères de l’Eglise, et l’Eglise dans sa liturgie…

    Le mot du texte massorétique (des juifs du Xe siècle, qui est censé faire autorité chez les catholiques) est « souph ». C’est un mot qui ne correspond à aucune racine hébraïque. Par conséquent on ne peut que conjecturer sa signification selon le contexte. Les dictionnaires supposent que le mot veut dire roseau ou jonc, voire papyrus, parce qu’il se trouve aussi au début du chapitre 2 de l’Exode, quand Moïse nouveau-né, placé dans une corbeille, est déposé dans les « souphs » des bords du Nil. Cependant, le même mot se trouve aussi dans le livre de Jonas, et là il s’agit (selon le texte massorétique qui ne correspond ni à la Septante ni à la Vulgate) des « souphs » qui entourent la tête du prophète quand il est jeté dans la mer. En haute mer, ce ne peut pas être des roseaux, et des roseaux ne se mettraient pas autour de sa tête. Donc ce sont des algues… Et donc le dictionnaire Brown Driver Briggs expose doctement que lorsqu’il n’y a pas le mot « mer » devant, « souph » veut dire algues… Mais Fillion (qui traduit la Vulgate où rien ne se met autour de la tête de Jonas) dit dans ses notes de l’Exode que la mer Rouge est en fait la « mer des Algues »…

    Conformément aux dogmes absurdes des exégètes modernes, personne n’imagine un instant que dans le texte hébreu dont disposaient les Septante et dans le texte hébreu dont disposait saint Jérôme, il pût y avoir un autre mot que « souph » pour définir la mer que traversent les Hébreux. Pour Exode 2,3, la Septante dit que Moïse dans son panier fut déposé « dans le marais près du fleuve », la Vulgate que Moïse fut déposé « dans les carex de la rive du fleuve ». Des carex : on n’est pas loin des roseaux, et d’ailleurs certains dictionnaires, prudents, parlent de plantes aquatiques… Il est donc vraisemblable qu’ici il y avait « souph ». Mais, précisément, si saint Jérôme avait vu « souph », peu après, dans le même texte de l’Exode, il aurait traduit « mer des carex », et non « mer Rouge ».

    L’accord entre la Vulgate et la Septante est un indice fort qu’il s’agit bien de la « mer Rouge ». Rouge comme le sang du Christ qui nous lave du péché dans le baptême, dans la mort et la résurrection du Christ, que figure le passage de la mer.

    En outre, l’invention de la « mer des Roseaux » est un immense cadeau fait aux rationalistes : si les Hébreux ont traversé une « mer de roseaux », c’est-à-dire « un marais », comme aurait traduit la Septante si elle avait vu « souph », c’est que parler de miracle est très exagéré. Or, comme le passage de la mer Rouge est l’événement sur lequel on revient sans cesse dans la Bible comme étant le miracle des miracles qui fonde toute l’histoire israélite, on détruit du même coup, d’un seul coup, tout le judaïsme, et aussi le christianisme, qui est indissolublement lié au symbolisme pascal du passage de la mer Rouge.

  • Une femme entourera un homme

    Aujourd’hui, et depuis bientôt un siècle, il n’y a plus d’exégète pour acquiescer à l’interprétation traditionnelle de Jérémie 31,22, quand le prophète annonce que Dieu va « créer du nouveau sur la terre : une femme entourera un homme ».

    C’est l’une des trois prophéties annonçant la naissance miraculeuse du Messie. Les deux autres sont « La Vierge concevra et enfantera un fils… » (Isaïe 7,14, qui annonce « un signe ») et « Jusqu’au temps où celle qui doit enfanter enfantera » (Michée 5,3, juste après « Et toi Bethléem… »).

    Depuis que les exégètes sont intelligents, ils ont décidé que ces trois prophéties n’en étaient pas. Isaïe dit simplement qu’une jeune femme sera enceinte (mais on ne voit pas en quoi ce serait un signe) et Michée dit que Dieu va abandonner son peuple le temps d’une grossesse…

    Pour en rester à Jérémie, Osty traduit : « La femme entourera l’homme », signale que c’est « un texte célèbre par la place qu’il a tenue dans l’élaboration de la théologie mariale » (sans dire pourquoi), et ajoute aussitôt que le vrai sens en est : la femme entourera son mari de ses prévenances. Ce serait ça la « nouveauté » créée par Dieu…

    Osty signale aussi comme digne d’intérêt la traduction de la Bible de la Pléiade : « La femelle tourne autour de l’homme ». La nouveauté c’est que ce n’est plus l’homme qui tournera autour de la femme pour la séduire, mais le contraire. Par rapport à l’interprétation mariale du texte, celle-ci, avec l’emploi du mot « femelle », est répugnante. En outre, dans le contexte, elle est absurde, puisque ce qu’annonce Jérémie fait partie des merveilles des temps messianiques. Or on voit mal les anciens israélites considérer comme une merveille l’inversion des rapports amoureux…

    Telle est pourtant l’interprétation en vogue, même si elle n’est pas toujours donnée de façon aussi grossière. Ainsi la TOB : « La femme fait la cour à l’homme », ou la Bible de Jérusalem : « La femme recherche son mari » (sic).

    « Une femme entourera un homme », a traduit saint Jérôme. C’est exactement ce que dit le texte massorétique que les exégètes d’aujourd’hui prétendent traduire. Et saint Jérôme avait expliqué que cette merveilleuse nouveauté que Jérémie prophétisait ainsi était qu’une femme serait enceinte (comme la Vierge d’Isaïe), entourerait (comme l’enceinte des remparts entoure la ville) en son sein non pas un fœtus, mais un homme accompli, l’homme-Dieu auquel rien ne manque puisqu’il est le Verbe incarné. Cela sera magnifiquement développé par saint Bernard dans sa deuxième homélie A la louange de la Vierge Mère (super Missus).

    Bizarrement, je suis plus porté à donner foi à saint Jérôme et à saint Bernard qu’aux exégètes rationalistes et myopes de notre temps…

    (Cette exégèse traditionnelle de Jérémie 31,22 est spécifiquement latine, parce que le texte de la Septante – au chapitre 38 - est très différent. Il y a pourtant une exception de taille, chez les pères grecs, c’est saint Athanase, dans son Exposé de la foi. Il faut donc que saint Athanase ait eu en mains une traduction grecque conforme au texte hébreu qu’aura ensuite saint Jérôme et au futur texte massorétique…)

  • Sainte Geneviève

    . Nova bella elegit Dominus ; mulier timens Dominum custodit civitatem, * Dumque una virgo praeliabatur, stellae adversus Attilam pugnaverunt.
    . Per fidem unius, fortes facti sunt omnes in bello, et castra verterunt exterorum. * Dumque una virgo praeliabatur, stellae adversus Attilam pugnaverunt.

    Le Seigneur a choisi une nouvelle forme de guerre : une femme craignant Dieu garde la cité, * Et tandis que la vierge combattait seule, les étoiles combattirent contre Attila.
    Par la foi d'une seule tous ont été rendus courageux dans la guerre, et ont renversé le camp des étrangers. * Et tandis que la vierge combattait seule, les étoiles combattirent contre Attila.

    Ce répons des matines, dans le propre de Paris, est inspiré par le cantique de Débora (Juges 5). Le verset qui commence par Nova bella elegit Dominus est aussi celui du graduel de la messe de sainte Jeanne d’Arc. On notera qu’il est propre à la Vulgate. L’hébreu massorétique, et le grec de la Septante, ont : « Il (le peuple) choisit de nouveaux dieux ». Le texte de la Vulgate est mieux en situation, à la fois dans le contexte, et dans le déroulement de l’histoire sainte, Débora étant la première femme d’Israël qui sauve le peuple, parce que Dieu a choisi cette nouvelle forme de combat, celui qui donne une « mère » au peuple élu…

    Au temps de Samgar, fils d'Anath, au temps de Jahel, les routes étaient abandonnées, et ceux qui voyageaient marchaient par des sentiers détournés. On a cessé de voir de vaillants hommes dans Israël. Il ne s'en trouvait plus, jusqu'à ce que Débora se fût élevée, jusqu'à ce qu'il se fût élevé une mère en Israël. Le Seigneur a choisi de nouveaux combats, et Il renverse Lui-même les portes des ennemis; tandis qu'auparavant on ne voyait ni bouclier ni lance parmi quarante mille Israélites. Mon cœur aime les princes d'Israël. Vous qui vous êtes exposés volontairement au péril, bénissez le Seigneur. (…) Qu'au lieu où les chars ont été brisés, l'armée des ennemis taillée en pièces, on publie la justice du Seigneur et Sa clémence envers les braves d'Israël. Alors le peuple du Seigneur a paru aux portes des villes, et il s'est acquis la principauté. Lève-toi, lève-toi, Débora; lève-toi, lève-toi, et chante un cantique… (Juges 5,6-12, traduction Fillion)

  • Vendredi des quatre temps de l’Avent

    L’évangile de mercredi était celui de l’Annonciation, l’évangile de ce jour est celui de la Visitation. En attendant la Nativité. Les antiennes des laudes et des petites heures continuent d’insister sur l’attente du Sauveur :

    Soyez persévérants *, et vous verrez le secours du Seigneur sur vous.

    Vers vous, Seigneur, * j’ai élevé mon âme, venez et délivrez-moi ; vers vous je me suis réfugié, Seigneur.

    Venez, Seigneur, * et ne tardez pas ; remettez les péchés d’Israël, votre peuple.

    Dieu viendra du Liban, * et sa splendeur brillera comme ta lumière.

    Pour moi, * je porterai mes regards sur le Seigneur, et j’attendrai le Dieu, mon Sauveur.

    La quatrième est particulièrement mystérieuse : Deus a Libano veniet. Elle l’est d’autant plus qu’il s’agit d’une citation d’Habacuc, qui introduit aux laudes précisément le cantique d’Habacuc, mais que dans le cantique on chante : « Deus ab Austro veniet » : Dieu viendra du sud !

    Le texte d’Habacuc est celui de la Vulgate, donc de saint Jérôme. Lequel, quand il avait rédigé un commentaire d’Habacuc, donnait : « Deus a Theman veniet ». Ce qui correspond au texte de la Septante… et au texte massorétique. Chez les pères, on trouve Theman (mais personne ne sait où c’est), ou Austro, mais aussi Africo (tant qu’à venir du sud…). Ce qui est étonnant est que la version « Dieu viendra du Liban » se trouve exclusivement dans l’antienne grégorienne, dont la base de donnée Cantus recense pas moins de 93 manuscrits, la plupart indiquant qu’il s’agit d’une antienne pour ce jour.

    *

    O radix Jesse

    O Racine de Jessé, * qui êtes comme l’étendard des peuples, devant qui les rois fermeront leur bouche, et dont les Nations imploreront le secours : venez nous délivrer, maintenant ne tardez plus.

  • (Vigile de saint Simon et saint Jude)

    En 1955 la plupart des vigiles ont été supprimées, ce qui a eu pour effet notamment de supprimer du calendrier officiel la messe et l’office de la vigile des apôtres Simon et Jude.

    Or cette vigile avait une messe propre, formée de divers éléments que l’on peut retrouver dans quelques autres messes, mais avec une antienne de communion qui n’appartenait qu’à elle :

    Posuérunt mortália servórum tuórum, Dómine, escas volatílibus cæli, carnes sanctórum tuórum béstiis terræ : secúndum magnitúdinem bráchii tui pósside fílios morte punitórum.

    Ils ont fait des restes mortels de tes serviteurs des nourritures pour les volatiles du ciel, des chairs de tes saints pour les bêtes de la terre : selon la grandeur de ton bras, prends en ta possession les fils de ceux qu’on a châtiés.

    Cette antienne est formée du verset 2 et du verset 11b du psaume 78, dans la version du psautier dit romain, antérieur à celui de la Vulgate. Il y a deux mots qui sont différents : « mortalia » au lieu de « morticina » et « punitorum » au lieu de « mortificatorum ».

    La première différence est sans importance. La seconde montre que saint Jérôme a corrigé le psautier romain pour qu’il soit plus conforme au grec : « ceux qu’on a châtiés, qu’on a punis », indiquait que si les juifs ont été massacrés par des païens c’est pour les punir de leurs péchés. Mais le texte grec ne le dit pas. Il parle de « ceux qui ont été tués ». Toutefois saint Jérôme a gardé une allusion à l'ancienne traduction, en choisissant « mortificatorum » (plutôt que par exemple « interfectorum »), puisque ce mot veut dire aussi « mortifiés ». Lorsque saint Jérôme a retraduit de l’hébreu il a gardé tel quel l’hébraïsme qu’on voit aussi dans le texte massorétique : « filios interitus », « les fils de la mort », pour dire « ceux qui sont voués à être tués ».

  • Quis mihi tribuat

    ℟. Quis mihi tríbuat, ut in inférno prótegas me et abscóndas me, donec pertránseat furor tuus, Dómine, nisi tu, qui solus es Deus ?
    * Et constítuas mihi tempus, in quo recordéris mei ?
    . Numquid sicut dies hóminis dies tui, ut quæras iniquitátem meam; cum sit nemo, qui de manu tua possit erúere ?
    ℟. Et constítuas mihi tempus, in quo recordéris mei ?

    Qui pourrait m’obtenir que vous me protégiez et me cachiez dans les enfers jusqu’à ce que passe votre fureur, Seigneur, sinon vous, qui seul êtes Dieu ? Et que vous me ménagiez un temps, au cours duquel vous souvenir de moi ? [Job 14, 13]
    Est-ce qu’ils sont comme les jours de l’homme vos jours [Job 10, 5a], pour que vous recherchiez mon iniquité [Job 10, 6a], alors qu’il n’est personne qui puisse me délivrer de votre main ? [Job 10, 7b]

    Répons des matines, l’un des « répons de Job », livre qui est la lecture biblique des deux premières semaines de septembre. On note que dans le verset 13 a été ajouté « nisi tu, qui solus es Deus » : si ce n’est toi qui seul est Dieu. Ces mots viennent de la fin du verset 4 du même chapitre 14. Mais dans la Vulgate on a « nonne tu qui solus es ? » : si ce n'est toi qui es le seul ? Le seul qui puisse dire Je Suis. Dans le verset 4 l’expression est la réponse à la question : « Qui peut tirer quelque chose de pur de ce qui est impur ? » (la Vulgate précise : « conçu d’une semence impure »). La Septante dit : « Mais pas un ». Le texte massorétique dit : « Pas un ». Autrement dit : personne. Ou bien saint Jérôme avait un texte légèrement différent, ou bien un rabbin lui a expliqué que c'est ainsi qu'on le comprenait (car Dieu, lui, peut tout).

    Antiphonaire d’Einsiedeln, début du XIVe siècle. Selon les spécialistes ce serait la copie originelle d’une partition de Guido d’Arezzo (inventeur de la portée de quatre lignes avec une clef permettant de localiser les demi-tons, vers 1035) :

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  • De la Sainte Vierge le samedi

    Christus virgo, mater virginis nostri virgo perpetua, mater et virgo. Jesus enim clausis ingressus est ostiis: et in sepulchro ejus, quod novum et in petra durissima fuerat excisum, nec antea quis, nec postea positus est. Hortus conclusus, fons signatus: de quo fonte ille fluvius manat, juxta Joel, qui irrigat torrentem vel funium, vel spinarum: funium, peccatorum, quibus ante alligabamur: spinarum, quae sufficiant sementem patrisfamilias. Haec est porta Orientalis, ut ait Ezechiel (7), semper clausa et lucida, operiens in se, vel ex se proferens Sancta sanctorum: per quam sol justitiae, et Pontifex noster secundum ordinem Melchisedech ingreditur, et egreditur.

    Saint Jérôme, lettre au sénateur Pammaque

    Le Christ est vierge, la mère de notre vierge est vierge perpétuelle (1), mère et vierge. Jésus en effet est entré, les portes étant closes (2) ; et dans son sépulcre, qui était neuf et creusé dans une roche très dure, personne ne fut déposé, ni avant, ni après lui (3). Jardin clos, source scellée (4) ; de cette source émane un fleuve, selon Joël, qui arrose le torrent des liens, ou des épines (5) : les liens des péchés par lesquels nous étions liés auparavant, les épines, qui étouffent la semence du père de famille (6). Elle est la porte orientale dont parle Ezéchiel (7), qui est toujours fermée et lumineuse, qui cache en elle-même ou qui fait voir par elle-même le Saint des saints ; par laquelle entre et sort le Soleil de justice (8) et notre Pontife selon l’ordre de Melchisédech (9).

    (1) Cf. « Ille virgo de virgine, de incorrupta incorruptus » (saint Jérôme, Contre Jovinien).
    (2) Jean 20, 19.
    (3) Luc 23, 53.
    (4) Cantique des cantiques 4, 12.
    (5) Joël 3, 18. Comme à son habitude quand il commente le texte sacré, saint Jérôme donne les deux traductions, de la Septante et la sienne, qui sera la Vulgate. Celle-ci, c’est le « torrent des épines ». Le mot hébreu que saint Jérôme avait était différent de celui qu’avaient les Septante, qu’ils ont traduit par σχοίνων : un mot qui veut dire « de joncs », ou tout ce qui est fait, tressé, avec des joncs. On remarque que pour saint Jérôme le mot paraît avoir perdu son sens de jonc pour désigner un « lien », une corde (tressée). Dans son commentaire du livre de Joël d’après les Septante, il traduit par le diminutif « funiculorum » : des cordelettes. Le mot qui figure dans le texte massorétique, Chittim, a été gardé tel quel, comme un nom propre, dans la Bible du rabbinat et quelques autres traductions. Chittim, comme le lieu où les Israéliens couchèrent avec les femmes de Moab, et le dernier campement avant l’entrée dans la terre promise. Mais Joël ne peut pas parler ici de ce lieu, puisque précisément il ne fait pas partie de la terre promise dont parle ce verset, il est au-delà du Jourdain. La majorité des traductions récentes donnent « la vallée » (ou « le ravin »)… « des acacias », parce que MM. Brown, Driver et Briggs en ont décidé ainsi…
    (6) Mat. 13, 7 ; Marc, 4, 7 ; Luc 8, 7.
    (7) Ezéchiel 44, 1.
    (8) Malachie 4, 2.
    (9) Psaume 109, 4 ; Hébreux 5, 1-9.

  • 3e dimanche après Pâques

    « Un peu »… Le mot se trouve sept fois en quatre versets. Dans un balancement : un peu, encore un peu. « Un peu et vous ne me voyez plus, encore un peu vous me verrez », dit Jésus. Les disciples se répètent la phrase entre eux. Et ils insistent : que veut-il dire par « un peu » ? Et Jésus répète la phrase, sans l’expliquer. Mais en ajoutant qu’ils pleureront et que le monde se réjouira. Ils éprouveront de la douleur comme une femme qui enfante. Et ils se réjouiront comme la femme qui vient d’enfanter.

    Jésus renvoie implicitement aux prophètes. Isaïe, dans son chapitre 26 qui chante l’attente amoureuse, la langueur de l’attente de la manifestation de Dieu, dit en son verset 17 : « Comme une femme sur le point d’accoucher se tord et crie de douleur, ainsi sommes-nous pour ton bien aimé par ta crainte » (selon la Septante qui est toujours en filigrane des évangiles).

    Et Michée, 4, 10 : « Souffre et prends courage, et approche, Sion, ma fille ; souffre comme une femme qui enfante ; car maintenant tu sortiras de tes murs, tu dresseras tes tentes dans la plaine, et tu iras jusqu'à Babylone ; puis le Seigneur ton Dieu t'en délivrera, et Il te tirera des mains de tes ennemis. »

    Encore un peu. Le grec dit « mikron », le latin « modicum ». Il ne faut pas traduire « un peu de temps ». Le mot « temps » ne se trouve pas dans le texte. Il faut garder l’ambiguïté. Car il ne s’agit pas seulement du temps. Il s’agit de l’espace, il s’agit de toute la création qui gémit des douleurs de l’enfantement, comme dit saint Paul reprenant les prophètes. Encore un peu. Une petite quantité. Avant de jouir de la qualité sans limite.

    Encore un peu. Parce que c’est le moment de l’accouchement. Mais c’est déjà « maintenant », dit Michée tant dans la Vulgate que dans la Septante que dans le texte massorétique. Maintenant.

    C’est pourquoi, dans le texte grec, le premier verbe est déjà au présent : « Un peu, et vous ne me voyez plus. » Le texte latin a le futur, et il ajoute ensuite « car je vais au Père », qui ne se trouve que dans de rares manuscrits grecs. Cette addition a pour but de préciser que Jésus a aussi dit cela, que les apôtres répètent sans comprendre. Mais il convient de garder les formules les plus elliptiques, les plus… prophétiques.

    N.B. – Ce dimanche est le jour de la « fête nationale de Jeanne d’Arc, fête du patriotisme », instituée en 1920. Par indult de Benoît XV, on peut célébrer ce jour la solennité de la fête liturgique de sainte Jeanne d’Arc, qui est le 30 mai.

  • De la Sainte Vierge le samedi

    Christus virgo, mater virginis nostri virgo perpetua, mater et virgo. Jesus enim clausis ingressus est ostiis: et in sepulchro ejus, quod novum et in petra durissima fuerat excisum, nec antea quis, nec postea positus est. Hortus conclusus, fons signatus: de quo fonte ille fluvius manat, juxta Joel, qui irrigat torrentem vel funium, vel spinarum: funium, peccatorum, quibus ante alligabamur: spinarum, quae sufficiant sementem patrisfamilias. Haec est porta Orientalis, ut ait Ezechiel, semper clausa et lucida, operiens in se, vel ex se proferens Sancta sanctorum: per quam sol justitiae, et Pontifex noster secundum ordinem Melchisedech ingreditur, et egreditur.

    Saint Jérôme, lettre au sénateur Pammaque

    Le Christ est vierge, la mère de notre vierge est vierge perpétuelle (1), mère et vierge. Jésus en effet est entré, les portes étant closes (2) ; et dans son sépulcre, qui était neuf et creusé dans une roche très dure, personne ne fut déposé, ni avant, ni après lui (3). Jardin clos, source scellée (4) ; de cette source émane un fleuve, selon Joël, qui arrose le torrent des liens, ou des épines (5) : les liens des péchés par lesquels nous étions liés auparavant, les épines, qui étouffent la semence du père de famille (6). Elle est la porte orientale dont parle Ezéchiel (7), qui est toujours fermée et lumineuse, qui cache en elle-même ou qui fait voir par elle-même le Saint des saints ; par laquelle entre et sort le Soleil de justice (8) et notre Pontife selon l’ordre de Melchisédech (9).

    (1) Cf. « Ille virgo de virgine, de incorrupta incorruptus » (saint Jérôme, Contre Jovinien).
    (2) Jean 20, 19.
    (3) Luc 23, 53.
    (4) Cantique des cantiques 4, 12.
    (5) Joël 3, 18 dans la Vulgate, 4, 18 dans la Septante. Comme à son habitude quand il commente le texte sacré, saint Jérôme donne les deux traductions, de la Septante et la sienne, qui sera la Vulgate. Celle-ci, c’est le « torrent des épines ». Le mot hébreu que saint Jérôme avait était différent de celui qu’avaient les Septante, qu’ils ont traduit par σχοίνων : un mot qui veut dire « de joncs », ou tout ce qui est fait, tressé, avec des joncs. On remarque que pour saint Jérôme le mot paraît avoir perdu son sens de jonc pour désigner un « lien », une corde (tressée). Dans son commentaire du livre de Joël d’après les Septante, il traduit par le diminutif « funiculorum » : des cordelettes. Le mot qui figure dans le texte massorétique, Chittim, a été gardé tel quel, comme un nom propre, dans la Bible du rabbinat et quelques autres traductions. Chittim, ou Sittim, comme le lieu où les Israéliens couchèrent avec les femmes de Moab, et le dernier campement avant l’entrée dans la terre promise. Mais Joël ne peut pas parler ici de ce lieu, puisque précisément il ne faisait pas partie a priori de la terre promise dont parle ce verset. La majorité des traductions récentes donnent « la vallée » (ou « le ravin »)… « des acacias », parce que MM. Brown, Driver et Briggs en ont décidé ainsi…
    (6) Mat. 13, 7 ; Marc, 4, 7 ; Luc 8, 7.
    (7) Ezéchiel 44, 1.
    (8) Malachie 4, 2.
    (9) Psaume 109, 4 ; Hébreux 5, 1-9.